samedi 15 août 2009

Origine des mots #8

80 mots sur 33 pages
SATIN
La ville chinoise de Quanzhou, dans la province maritime du Fujian s’appelait autrefois Tsia-toung. Dès le Moyen-Âge, sous le nom de Ci-tong, elle s’était spécialisée dans la confection d’une certaine forme de tissage, brillant à l’endroit et mat à l’envers.
Les bateaux-marchands arabes avaient coutume de fréquenter ce comptoir, étape d’une des Routes de la Soie, célèbre depuis le XVIème s. pour la porcelaine dite « blanc-de-Chine » et cette étoffe qu’ils nommèrent du nom de la ville zaytun, avant de la diffuser en Occident.
C’est ainsi que Français, Italiens, Anglais, Allemands et Russes ont nommé l’étoffe SATIN, les Turcs et les Espagnols « saten » et les Portugais « cetim ».
IDIOTISME
C’est une construction ou une association de mots, autrement dit une expression, propre à telle ou telle langue. Sa traduction littérale correspondrait à une ineptie ou a une incongruité, quoi qu’il en soit à une incompréhension de l’interlocuteur.
Chaque langue a ses idiotismes et la nature humaine étant unique sur toute la planète, il s’avère qu’à tel ou tel idiotisme dans une langue correspond un idiotisme de même sens dans une autre langue, quand ce n’est pas dans toutes les autres.
Le mot vient de l’adjectif grec idios (= qui appartient en propre à). On est très loin de l’adjectif péjoratif « idiot » (à l’origine signifiant « être étranger à un métier ». D’où le glissement vers des quasi-synonymes tels que crétin, bête, imbécile, stupide, abruti, insensé, pour rester poli).
Il y a donc des latinismes, des hellénismes (pour le grec), des germanismes, des anglicismes, des hispanismes, des slavismes (pour le russe par ex.). La langue française a ses gallicismes.
EX : en français on paie « les pots cassés », alors qu’en portugais on paie « les fèves » ( pagar as favas). En français on ménage la chèvre et le chou ; en espagnol on « brûle un cierge à Dieu et un autre au diable » (encende una vela a Dios y otra al diablo ).En France il pleut des cordes ; en Angleterre il pleut « des chats et des chiens » (it rains cats and dogs). Les Français filent à l’anglaise, les Anglais filent à la française (take the French leave). Les Français « mangent les pissenlits par la racine », alors que les Allemands « regardent les radis par en dessous » (sich die Radieschen von unten ansehen).

BIOPSIE
C’est le moyen, pour l’heure le plus fréquemment employé, pour diagnostiquer un cancer éventuel. Le prélèvement d’un fragment d’ organe ou de tumeur sur le vivant ( bio) permet l’examen (opsie) histologique.
Le mot se compose de deux racines grecques : bio (=la vie) comme dans biologie et opsis (=vue) comme dans ophtalmologie.
Notons en passant que le son « B » n’existe pas en grec et que la seconde lettre de l’alphabet, sous la forme « B », se prononce « V », d’où le mot latino-français « VIE », correspondant au grec bios.
La même remarque s’applique à la lettre cyrillique « B ». C’est ainsi que le nom BASILE se prononce en russe Vassili.

HALLEBARDE

Dérivée de la hache et du vouge, cette arme d’hast fut d’abord utilisée par les soldats allemands dès le XIVème s. et actuellement comme arme d’apparat par les Gardes suisses du Vatican.
Certains étymologistes font dériver le mot du francique helmbarte où healm signifie heaume et barte hache.
Je pencherai plutôt pour une origine arabe al barte (=pointe de lance) adoptée par l’italien sous la forme alabarta.
L’anglais la nomme halberd, l’espagnol alabarda et le russe alebarda.
Si l’on prend en compte le sens argotique de « lansquiner » qui est « pleuvoir », on comprend alors la vieille expression française « il pleut des hallebardes », c’est à dire « à verse ». L’eau qui tombe est si serrée, si drue qu’elle a l’effet de piques qui vous transpercent. Les Normands ajoutent du pittoresque local en précisant : « comme vache qui pisse ».
Notez que l’expression anglaise correspondantes est : It trains cats and dogs (= il pleut des chats et des chiens) , qu’en Allemagne il pleut des ficelles (es regnet Bindfäden), plus minces que nos cordes et qu’ à Moscou la pluie, en ce cas, n’est que battante (prolivnoï).

ADÉNOME
C’est une tumeur bénigne se formant à partir des cellules à la surface des organes, c’est à dire n’infiltrant pas ces derniers.
L’ADÉNOME touche surtout les glandes telles que le sein chez la femme, ou la prostate chez l’homme (myofibrome).
Le mot se compose de deux racines grecques : adèn (=glande) et nomos (=désignation).

PACOTILLE
Les lexicographes français font venir le mot de l’espagnol pacotilla, alors que la Real Academia española prétend que le mot a été emprunté au français « paquet ».
Au Chili on appelle pacotilla la racaille, au Nicaragua c’est une bande de copains. Dans les plaines argentines paca est un ballot de laine ou de coton et pacota est quelqu’un d’insignifiant. Pacotilla désigne en castillan la quantité de marchandises que marins et officiers d’un navire peuvent légalement embarquer en franchise.
Par extension le sens s’est déplacé pour insister sur le peu de valeur de certaines choses ou personnes. Au point que dans les rues de Manhattan les vendeurs de camelote à la sauvette sont appelés pacotilleros par leurs compatriotes hispaniques de la métropole new-yorkaise.

UNION
Quel mot merveilleux, ne serait-ce que pour définir l’Amour parfait ! Beaucoup plus simple et noble que ses presque synonymes « fusion » ou « symbiose ».
UNION vient directement du latin unio qui désigne l’unité, mais aussi l’as aux cartes et aux dés, et chez Pline une grosse perle.
C’est la racine indo-européenne que partagent le grec oinos ( = un), l’allemand ein, l’anglais one et même le russe adin, mais aussi le français « oignon », cette plante condimentaire à l’odeur forte offrant, à la différence de l’ ail, auquel l’oignon est associé, un tubercule unique.
Pour l’anecdote j’ajouterai que c’est probablement cette racine que l’on retrouve dans le mot gnon ( dérivé du féminin « gnole », abréviation de torgniole), ce coup d’un seul poing qui laisse une seule marque au receveur.

ROMANICHEL
Il est une langue non écrite dont les millions de locuteurs de par le monde sont appelés « gens du voyage » : c’est le romani, de la famille linguistique indo-européenne , comme le français.
Chassés au VIIIème s. de l’embouchure de l’Indus par les bouleversements climatiques, ces gens, devenus nomades permanents, durent s’exiler vers la Mésopotamie, puis personae non gratae , vers la Grèce où ils s’appellent Tsiganes ( du grec a-tigis = intouchables). De là ils migreront vers l’Égypte ( d’où leur nom en anglais gipsies, ou en français « gitans ») ;, puis vers l’Europe occidentale , s’établissant un temps le long du Danube en Transylvanie ( d’où leur nom en français de Romanichels).
Héros de l’épopée indienne Ramayana, ils se nomment également tantôt Roms, tantôt Manouches ( = « être humain » en sanskrit), tantôt Kalé (= bruns) en Espagne au temps de l’Inquisition.
Il n’y a en fait qu’en Foumanie où ils sont sédentarisés qu’ils ne portent pas le nom de Roms, mais celui de Valach ( de Valachie)
Quant à l’appellation ROMANICHEL, c’est tout simplement la francisation de « Romani chel » (= peuple roumain), alors que Bohémien tend à les faire venir de Bohême.
On en dénombre 300.000 en France, 500.000 au Kosovo, 550.000 en Turquie, 600.000 en Hongrie, 800.000 en Espagne, mais plus de deux millions et demi en Roumanie. Certains ont migré dans les Amériques où ils forment des communautés soudées.
J’ai rencontré l’été dernier à Topana, banlieue pauvre de Skopjie de Macédoine, un Américain enseignant bénévolement l’anglais à des jeunes Roms. La Macédoine est le seul pays du monde où le romani est langue officielle.
Ai noté que l’école s’appelait « Sumnal », un mot qui signifie à la fois « saint » et « monde », à l’instar du mot russe mir qui a les deux sens de « monde » et de « paix ».

MAISON
C’est la francisation du substantif latin mansio(nem) qui signifie « habitation », que l’on retrouve notamment dans l’anglais mansion (=hôtel particulier, immeuble loué par appartements), et les mots français « manoir, mas, masure, manse ».
La racine latine apparaît dans le verbe manere (=rester, demeurer).
Si le mot mansio s’est imposé dans les parlers latins du nord, c’est casa (=case, maison) que l’on retrouve dans les parlers latins du sud ( espagnol, italien,portugais) et comme origine de l’expression in casa + génitif, devenue enchiès au XIIIème s., puis CHEZ en français moderne.
Notons que le mot espagnol meson a le sens restrictif de « lieu où l’on peut se restaurer », voire auberge, avec l’accent tonique sur la dernière syllabe, le mot ayant été oralement emprunté au français.

APARTHEID
Le mot fut créé en Afrique du Sud pour désigner la politique de séparation raciale entre Blancs et Noirs, en vigueur jusqu’en 1990.
Ce terme afrikaaner se compose de l’expression empruntée au français « À PART » suffixée de la particule d’état néerlandaise « -heid » , correspondant à l’anglais « -hood », comme par exemple dans childHOOD (= enfance).
Ce suffixe germanique –heid, ou -hood en anglais qui s’utilise librement avec la plupart des substantifs ( brotherhood, , neighbourhood) voire avec des adjectifs (falsehood, likelihood) pour indiquer une condition ou un état.

CRABE
Ce mot fut emprunté par les Picards au hollandais crabbe , du genre féminin, d’où la propension des Jersiais francophones et Bas-Normands à dire « une crabe » alors qu’il s’agit d’un masculin en français contemporain.
Le terme, d’origine germanique était krebis en vieux saxon et krevet en bas-allemand. Aujourd’hui l’allemand dit die Krabbe, donc au féminin, alors que die Krebs désigne l’écrevisse outre-Rhin.
La racine se retrouve dans le verbe norrois krabben qui signifie « pincer ». Il est évident que la créature a été dénommée en raison de ses pinces.
En sanskrit CRABE se dit karkata d’où est dérivé le grec karkinos qui veut dire crabe, avec pour doublet « cancer, chancre », mais aussi « pince , tenaille » C’est ainsi que les deux adjectifs qualifiant ce qui propage le cancer sont cancérigène et carcinogène.

HOMOTHÉTIE
Un mot récemment encore rare que l’on entend maintenant de plus en plus à la radio (France Culture). Il est composé de deux racines grecques : omos (=semblable) et tésis (=opinion, avis, position ou thèse, ce dernier étant un dérivé direct).
Le terme était utilisé depuis longtemps dans le jargon de la géométrie, notamment dans l’expression « figures homothétiques ». Mais on l’entend de nos jours dans la langue courante en lieu et place de « similitude ».
C’est ainsi que j’entendais récemment dans la bouche d’un Académicien : « La période que nous vivons actuellement et la Révolution sont presque une homothétie ».

ANGIOME
C’est une tuméfaction violacée causée par une malformation vasculaire. Elle est soit tubéreuse, soit plan et apparaît le plus souvent à la naissance ( et aisément traitable alors, par exemple par cryothérapie) et à la face.
Beaucoup l’appellent envie , ou tache de vin en raison de sa couleur.
L’origine est le mot grec agueione (= enveloppe d’un organe, veine, artère).
Le thérapeute s’occupant du système vasculaire s’appelle angiologue.

OURS
Ce mot est dérivé du grec arktos que l’on reyrouve dans le breton arzh, l’italien orso, l’espagnol oso et le latin ursus.
Ce dernier mot latin fait ursa au féminin et désigne soit la femelle de l’ OURS, soit la constellation ( Petite et Grande Ourses), mais également les contrées septentrionales du globe que l’on appelle justement « arctiques » du mot grec arktos.
N’est-il pas surprenant que les Slaves usent d’un euphémisme pour désigner ce plantigrade cruel. Ils l’appellent miedvied c’est à dire « mangeur de miel ». C’est le nom du troisième Président de la Fédération de Russie : Dmitri Medvedev.

PHYLUM
Ce mot est dérivé du grec fulè (=groupe de familles de même ethnie).
Il est surtout employé en biologie pour désigner l’ensemble des espèces, genres, familles descendant les uns des autres et constituant une lignée complexe.
Mais ce mot que vous avez découvert, M.Lebrun d’Aubervilliers dans un texte de la mairie de Paris est à prendre au sens sociologique et désigne l’ensemble des associations se succédant dans le temps en un même endroit, le département de Seine-St Denis, chacune s’installant grâce à l’accommodement ou à l’adaptation réalisé par la précédente.

SANGLOT
Ce mot a sa source dans le latin singultus, dérivé du verbe gluttire qui signifie avaler ou étouffer la voix, et qui a donné le russe glotka (=pharynx, gosier) et le français déglutir.
C’est singultus qu’employait Sénèque pour désigner le hoquet, le soubresaut. Pline y ajoutait le gargouillement de l’eau.
Personnellement j’apprécie la suggestion du poète qui voit dans SANGLOT un mélange de sang et d’eau.

BOOSTER ( parfois écrit « bouster »)
Voici l’emploi incongru d’un pseudo-anglicisme, généralement utilisé pour faire bien par ceux qui ne parlent pas couramment anglais.
En anglais le substantif booster a le sens d’ amplificateur, de survolteur. A booster shot est une piqûre de rappel. À New York booster désigne par exemple un « supporter » actif et enthousiaste.
Même si on ignore l’origine de ce mot anglais, c’est une erreur pour un Français de l’utiliser alors qu’il a à sa disposition tout un vocabulaire : pousser, inciter, survolter, exalter, galvaniser.

VERBATIM
C’est un adverbe latin, adopté en français, et vulgarisé par un Conseiller de l’Elysée en 1982, qui en fit le titre d’un de ses ouvrages et qui signifie sous la plume d’Erasme : « textuellement, mot à mot ».
La racine est le substantif verbum (= mot, terme, expression, parole) dont sont dérivés les substantifs allemand Wort et anglais word qui ont le sens de « mot ».

ALLICIANT
Voici un adjectif peu usité qui vient du verbe latin adlicere qui signifie « attirer par des paroles euphémiques ».
J’ai entendu ce mot dans la bouche d’un interne de l’Assistance publique , probablement latiniste, d’un hôpital voisin, s’adressant à un de ses confrères au sujet de l’ un de ses patients venu en ville de sa campagne profonde pour subir une biopsie.
Au lieu d’annoncer la couleur et de déclarer qu’à la suite de cette intervention, on verrait bien si la tumeur du pauvre homme est cancéreuse, il souffla à l’oreille du médecin traitant , en esquissant un sourire rassurant : « Nous serons alors fixés et verrons si cette tumeur relève de l’oncologie ! » Précisons que le grec onkos désigne une tumeur maligne.
Je suis persuadé qu’à son retour à la ferme, notre brave homme rassura son épouse en lui disant qu’à aucun moment le médecin n’avait parlé de cancer.

SIROP
Dérivé du latin médiéval par emprunt à l’arabe charab qui signifie « boisson », du verbe sémitique charib (=boire).
C’est à l’instar de l’arabe que toutes les langues de la famille linguistique indo-européenne ont suivi le processus avec syrup en anglais ( mais en pharmacie une bouteille de sirop s’appelle mixture), Sirup en allemand, sciroppo en italien et sirop en russe.
Même l’espagnol jarabe (=sirop) est du même tronc, à savoir de l’arabe charap.
Les Turcs ont emprunté au même tonneau sous la forme chorbet , devenu « sorbet » en français et sherbet en angloricain, alors qu’à Londres le sorbet est appelé sorbet ou water-ice par les illettrés.
Notons en passant que dans la majorité des langues le nom de la boisson de base est à l’origine un dérivé du verbe « boire » par ex.
« bière » en français, mais aussi Bier en allemand, , bira en bulgare, grec, turc, birra en italien, bir en indonésien, bere en roumain, beer en anglais, viennent du verbe boire
charab en arabe du verbe charib (=boire)
pivo en russe, tchèque, serbe , du verbe pits (=boire).
En revanche il est des pays où l’on précise qu’il s’agit d’une boisson à base de céréales, ainsi l’espagnol, cubain, argentin, etc. qui disent cerveza, ou cerveja en portugais, ou encore serbesa en tagalog.

TULIPE
C’est au XVIème s. que le mot a gagné l’Europe occidentale, en provenance de Turquie où , à l’époque, il s’écrivait tuliband ( actuellement tülbend), dérivé du persan dulband, avec le sens de « turban ». Il est vrai que la Liliacée ressemble à un turban, ainsi que le remarqua, en latin, dès 1554 l’ambassadeur du Saint-Empire O.G de Busbecq, après sa découverte de la fleur à Andrinople, puis en visitant les jardins de Soliman le Magnifique à Fatih (Constantinople).
Le diplomate, savant polyglotte, botaniste et naturaliste ( français bien que né dans la Flandre d’alors) a rapporté, en plus de la tulipe, le lilas et le marronnier d’Inde.
Notons qu’en 1635 un bulbe de tulipe valait à Amsterdam le prix d’une maison ou la dote d’une jeune fille.

HURE
C’est le nom donné à la tête de certains animaux ; surtout lorsqu’elle est coupée, si ce détail peut vous donner quelque espoir, Mme Vivien de Percy.
Il est certain qu’en onomastique s’il est reconnu que les prénoms, lorsqu’ils ont été pensés par les parents ou parrains, ont une influence sur le caractère de ceux qui les portent toute leur vie, d’où l’importance du choix délibéré d’un prénom, il est patent que les noms de famille, tout au moins ceux dérivés d’adjectifs ou encore par métonymie, ont été attribués à la génération d’origine eu égard aux qualités, bonnes ou mauvaises, et caractéristiques de l’individu.
Étymologiquement HURE ( probablement du latin urus =tête de bœuf, origine du mot « ours »), désigne surtout la tête du sanglier, fonceur et agressif et le nom Hurel a de toute évidence été attribué, il y a peut-être plusieurs siècles, à une personne de mauvais caractère au visage hirsute de barbe et cheveux négligés. N’en soyez pas « ahurie » !.
Si, pour couronner le tout cet ancêtre a épousé quelqu’une du nom de Hérissé, le mélange devient explosif.
Notons pour l’anecdote que sanglier et hérisson sont du même phylum, comme pourrait en témoigner l’anglais qui nomme hedge-hog (=cochon de haie) le hérisson.
Savez-vous que ce sont les Français d’Amérique qui, au XVIème s. ont appelé HURONS (= homme à la tête hérissée) les Indiens iroquois qui parlaient le wendat, par référence à leur coiffure emplumée.

ARTICHAUT
C’est l’italomanie du XVIème s. qui nous a apporté ce mot sous la forme toscane carciofo, emprunté à l’arabe al-karshof. Si les Toscans ont oublié comme initiale l’article arabe « a » (ou al-) les Lombards ( avec articcioco), les Espagnols (avec alcochofa) , les Anglais (avec artichoke), les Allemands ( avec Artischocke ) et les Hollandais (avec artisok) l’ont, à l’instar des Français, gardé.
Notons qu’à Madrid est vendue une boisson alcoolisée, du genre apéritif, à base d’ARTICHAUT, mais que pour ne pas décourager le consommateur éventuel, on lui a donné le nom savant, donc latin, des botanistes , à savoir Cinara, agrémenté d’un « Y » : cynara .
Ajoutons pour la gloire que le nom latin vient du grec kinara (=chardon), l’aspect de la fleur de l’artichaut rappelant le chardon, et que les Anglais appellent Jerusalem artichoke, une sorte de tournesol aux racines comestibles.

REDINGOTE
Curieux voyage que celui de ce mot en Europe ! C’est la prononciation qu’en décidèrent les Français du XVIIIème s. en lisant le terme anglais riding-coat (= veste de cavalerie), mais il convient de noter que si riding , participe présent du verbe ride (= aller à cheval), vient d’une racine germanique signifiant « être porté », le mot coat , lui, est un emprunt au français « cotte », qui, au Moyen-Âge désignait une sorte de tunique, surtout portée par les chevaliers.
Mais il y a litige quant à l’origine du mot « cotte ». Vient-il du germanique ancien signifiant « manteau », ou du grec (s)kutos (= peau, cuir travaillé) , racine que l’on retrouve dans le français « cuti » de cutiréaction ?
Notons enfin que « cotte » est à l’origine de cotillon et que le verbe anglais ride a donné le substantif rider pour désigner par exemple le passager d’un véhicule et le différencier de driver (=conducteur, chauffeur).
Pour l’anecdote précisons que les Russes, marqués par la redingote grise de Napoléon en 1812, adoptèrent le vêtement, mais ils le nommèrent siourtouk , du français « surtout », et avec l’accent tonique sur la finale, à la française.

RAZ (de marée)
Mot scandinave apporté par les Vikings dont la toponymie donne de multiples exemples ( Pointe du Raz en Bretagne, Raz Blanchard entre la Hague et l’île d’Aurigny). Son sens est « courant d’eau ». Il s’agit d’un violent courant marin souvent dû au rétrécissement du passage. RAZ partage ainsi l’(étymologie de l’anglais race (= course).

PASTAFARIEN
Mot rencontré par hasard l’hiver dernier aux USA sur la nationale 26, aux abords de Charleston en Caroline du Sud, au haut d’une immense affiche exposant un monstre ressemblant à un plat de spaghettis à la bolognaise.
Trop long pour être anglais le terme, je l’appris une fois arrivé à destination, était le résultat d’un jeu de mots sur le mouvement religieux « Rastafari » ( en langue amharique rasta signifie « tête, leader » et tafari , « celui qui est craint »). À noter pour mémoire que TAFARI fut le nom de baptême du Roi des Rois ( alias Hailé Sélassié), empereur d’Ethiopie au siècle dernier, prétendu descendant de Salomon. Les pratiquants rastafariens, souvent appelés « rastas », sont créationnistes et font de leur croyance un mode de vie.
Quant aux PASTAFARIENS ( changement de l’initiale « R » en « P » pour « pasta » =nouilles), ils sont disciples de l’universitaire Bobby Henderson qui , en 2005, créa une parodie de religion pour protester contre l’enseignement exclusif des Écritures au lycée.
La religion chrétienne étant une seconde nature outre-Atlantique ( serment présidentiel sur la Bible, annonce du divin sur les timbres postaux et la monnaie, prières à l’école, etc.), les tenants de l’ évolutionnisme se font les hérauts de l’athéisme, mais les PASTAFARIENS poussent l’opposition jusqu’à tourner la religion traditionnelle en dérision en affirmant que le monde a été créé par le « Monstre aux Pâtes Volant ».
Il est probable que, comme pour le reste, les vents d’ouest portent un jour cette nouvelle croyance jusqu’aux rives de la vieille Europe.

CIRCONSCRIRE
Ce verbe vient du verbe latin circumscribere où la racine scribere signifie « tracer, écrire » et le préfixe préposition/adverbe circum veut dire « autour ».
Depuis le XIXème siècle une des acceptions du verbe est : tracer une frontière afin qu’un mal, un incendie ne se propage pas .
À la différence de « maîtriser » qui précise qu’on a dompté, réduit à l’impuissance, vaincu un incendie, un sentiment, une passion, CIRCONSCRIRE laisse entendre qu’on fait la part du feu, mais avec une limite.
Le substantif dérivé « circonscription » indique une division du territoire, du point de vue administratif, judiciaire, électoral, parfois commercial.

VALEURS
Voilà un mot bien galvaudé de nos jours lorsqu’il est employé au pluriel. À le prendre à la lettre sa sémantique le promène du pécuniaire (les valeurs boursières) au spirituel (les valeurs humaines).
Et chacun y attache sa propre conviction ou son intérêt personnel. Pour les uns les VALEURS sont vecteur d’avancement, pour d’autres de conformisme. Tous se retrouvent en promouvant les VALEURS à l’aune de la culture libératrice.
Le mot, au singulier, est dérivé du verbe latin valere qui signifie « être fort, en bonne santé » et dont on retrouve les dérivés en allemand (walten), en breton (glad, après chiasme consonantique V < > G), en russe (vlad , comme dans Vladimir ou Vladivostok) et en français (valoir, vaillant).

BOUTIQUE
Voici un mot qui vient de loin et dont l’itinéraire suit les voies du commerce. L’origine est le grec apotéké (= lieu de dépôt, magasin d’approvisionnement), dérivé du verbe apotitémi (=déposer, mettre en réserve) dont le préfixe apo signifie « de côté, séparé de).
Le radical téké (= boite, coffre, étagère) se retrouve dans les mots tels que bibliothèque (pour les livres), discothèque (pour les disques), pinacothèque (pour les peintures et tableaux), mais aussi par extension dans médiathèque et vidéothèque.
Le magasin de base le plus utile, celui qui offrait le plus de denrées indispensables à la vie (médicaments, sucre, sel, etc.) et produits exotiques comme les épices était tenu par l’ apothicaire.
Dans de nombreux pays comme l’Allemagne et la Russie, la variété des produits traditionnels a été réduite aux médicaments, au point que Apotheke correspond à « pharmacie » en français.
Une fois oubliée l’initiale « A » , POTÉKÉ s’est transformé avec les siècles en BOUTIQUE en français et outre-Pyrénées en bodega qui en castillan signifie « cave à vin », mais en espagnol américain « épicerie ».
Notons que le mot BOUTIQUE s’est vulgarisé dans tous les pays développés de la planète dès qu’il s’agit de magasin de mode.

LAYETTE
Ce mot est l’exemple d’une racine indo-européenne extrêmement riche. En effet si l’origine se retrouve en composition dans le mot toponymique sanskrit « Himalaya » où la seconde partie « LAYA » a le sens de « couche », c’est à dire de choses placées à plat.
(HIMA s’apparentant au latin hiems (=hiver), au grec kheimôn (=saison du mauvais temps > hiver), au russe zima (=hiver) et au français hiberner.
Quant à la racine qui nous intéresse dans LAYETTE, on la retrouve aussi bien dans le grec lekos (=lit, couche) que dans le gotique ligon (=être couché), l’allemand legen (=mettre dans une position horizontale, coucher) et liegen (=être couché),l’anglais lie (=être couché) et lay (=coucher), le français lit qu’en espagnol lecho et en italien letto.
Par extension l’allemand die Lage (=position, situation) et das Lager (=couche, camp)
C’est par procédé métonymique que du hollandais laeye (=petite caisse où ranger les choses à plat), le français a créé LAYETTE pour désigner le trousseau de bébé qu’à l’origine on rangeait à plat dans ce petit meuble.

BERGAMOTE
Contrairement à la thèse de certains lexicographes qui font remonter ce mot à la « poire du Bey », je penche pour l’agrume que les Anglais appellent bergamot orange et dont vous pouvez voir l’arbre décorant la place Syntagma ( = du Gouvernement) à Athènes. Pour en avoir goûté le fruit, il est certes celui d’une orange trop amère pour être comestible. J’en ai aussi découvert des feuilles dans une salade préparée par un restaurateur de Reggio de Calabre qui m’en a vanté les vertus thérapeutiques ( diurétique, carminative,relaxante).
Que le mot turc armut (=poire) ait été employé n’est pas impossible, la confusion étant fréquente dans la dénomination des fruits, mais il est probable qu’il s’agisse d’une « orange de Bergame » (d’où vient également le mot « parchemin »), tout comme ce qu’on appelle généralement la « pomme d’Api » ( en grec apium) est en fait une poire.
C’est dans la parfumerie que l’on utilise surtout la BERGAMOTE..
La plupart des langues indo-européennes usent du même mot que le français , avec variantes orthographiques.

PUMPERNICKEL
C’est le nom d’un pain de seigle , populaire en Westphalie et que personnellement je trouve délicieux. Il est noir et légèrement humide. Je l’ai souvent vu offert sous cellophane à la vente dans les grandes surfaces de France . Mais l’intérêt réside dans son nom : le mot, déformé du français et adopté par les habitants d’Allemagne septentrionale, viendrait de Napoléon. On lui aurait offert quelques tranches de ce pain complet et ne le trouvant pas à son goût , il aurait dit : « C’est tout juste bon pour Nickel ! ». Or Nickel était le surnom de l’une des juments, à la robe grise, de l’Empereur. « Bon pour nickel » serait devenu PUMPERNIKEL.



ONATES
C’est le mot qu’emploient les entomologistes pour désigner un ordre d’insectes prédateurs (d’où leur nom, venant du grec odôn (=dent) en raison de l’aspect broyeur de la dentition), aux yeux volumineux, à l’abdomen étroit et allongé, pondant ses oeufs dans l’eau.
Cet ordre a deux branches : l’ agrion ( du grec agrios = sauvage) souvent confondu avec la Demoiselle, et la libellule ( du latin libella = niveau d’eau, à cause de la façon dont plane cet insecte).
Profitons de l’occasion pour indiquer que le mot INSECTE est le doublet latin du grec ENTOMO- .

VIKING
Le mot vient du vieux norois weils et désigne sous la forme progressive itérative le déplacement des hommes de vicus en vicus (=bourg, village). C’est ainsi que se déplaçaient ces audacieux navigateurs nordiques allant chercher fortune, sous des climats plus doux, le long des fleuves et des côtes, sans jamais s’en écarter trop. Ils pillèrent aussi bien Paris que Kiev et Bagdad. Les Francs les appelaient Normands, les Anglais Danois, les Slaves Rus ou Varègues.
Le mot latin vicus vient du sanskrit vesa dont est dérivé le grec oïkos (=maison), origine des mots en préfixe « éco-« comme écologie, économie.
Ces navigateurs ont généreusement approvisionné la toponymie française
en laissant des communes telles que Vic-sur-Aisne, Vix en Vendée ou Longwy (=long village).

PILLOTER
Quel joli verbe ! Une sorte de fréquentatif poétique du verbe « piller », alors que ce dernier a eu successivement les sens de mordre, d’injurier, de voler avec violence. La racine originale est bien le poil. Au XVIIème s. « piller » correspondait souvent au plagiat littéraire.
Dommage que ce vieux mot encore d’usage courant au XIXème s. soit tombé en désuétude !
Dans ses Essais (Livre 1, §26) Montaigne écrit : « Les abeillzs pillotent deçà delà les fleurs, mais elles en font après le miel, qui est tout leur ».
PILLOTER n’est plus alors péjoratif. L’action s’apparente plutôt à la compilation. Notons que contrairement au français qui revêt d’une acception souvent dépréciative le mot compiler, de même origine que PILLOTER, l’anglais to compile (= sélectionner ce qu’il y a de meilleur) n’a rien de négatif.

COLZA
C’est un mot d’origine germanique nous parvenant des Pays-Bas où sa culture est intensive. Il est composé de deux racines :
- COL , du néerlandais kool ( = chou) que l’on retrouve dans le français-italien broCOLI ( chou-fleur vert), l’anglais coliflower (=chou fleur) , l’américain coleslaw (= salade de chou cru), et les divers mots signifiant CHOU comme le latin caulis, le grec kaoulos, l’espagnol col, l’italien cavolo, mais aussi, en raison de la métonymie ( du tube, de la tige) le français « couloir », l’anglais colander (=passoire)et le malais kuluar (=sortie).
- et ZA , du néerlandais zaad (=graine) que l’on retrouve dans l’allemand Saat (=semence), Same (=graine), saën (=semer), et le breton had.
La racine originelle de ZA est le latin serere (=semer, planter, ensemencer).

GOUTTE
Ce mot est dérivé du latin gutta désignant une « petite quantité de liquide se détachant sous forme sphérique ». C’est aussi le nom d’une pathologie due à un trouble de métabolisme de l’acide urique qu’en latin décadent on nommait male gote.
Cette diathèse arthritique se manifeste généralement par une vive douleur au niveau du gros orteil chez les gros mangeurs obèses, souvent les chasseurs, par un dépôt d’urate aux jointures inférieures.
Si depuis la haute Antiquité la GOUTTE se soigne avec la colchicine, puis plus récemment par un régime pauvre en protides ( recommandant notamment d’éviter viandes, bière, rhubarbe, oseille, fruits de mer, sodas et de suivre des cures thermales - Évian, Vittel, Royat) des chercheurs américains de l’hôpital Johns Hopkins de Baltimore viennent de découvrir que la mutation d’un gène spécifique (ABCG2) sur le chromosome 4, serait à l’origine de la maladie.

PASIGRAPHIE (prononcer : pazi…)
C’est un système d’écriture qu’on peut considérer universel et dans lequel on peut transcrire toutes les langues, soit par l’emploi d’idéogrammes, soit à l’aide d’un alphabet vraiment complet.
Le mot se compose de deux racines grecques :
-le radical GRAPHIE , du verbe grafein (=écrire) comme dans orthographe, photographe, télégraphe ;
- le préfixe PASI, de l’adjectif pan (=tout), comme dans panoplie, panorama, panacée, pancréas.
Les philologues connaissent un système analogue, appelé API (alphabet phonétique international) qui permet à quiconque le connaissant de prononcer correctement n’importe quelle langue sans l’avoir apprise ou pratiquée. Les anglicistes ont tous le dictionnaire de prononciation de Daniel Jones.

AZUR
Ce mot nouds vient du persan lasouard qui désigne une pierre fine bleutée, mot que l’on retrouve dans l’espagnol laude (=pierre tompbale), dérivé du grec lepas (=rocher) et dans « lapis-lazuli » oùle terme latin lapis signifie « pierre » (cf. lapider, lapidaire) et « lazuli » de la couleur de l’oxyde de cobalt.
Anglais et Allemands usent du même mot que nous, Espagnols et Portugais disent azul, les Italiens, naturellement emphatiques, usent du mot azzurro, ces différentes désinences « L » et « R » nous rappelant les deux mots de latin décadent lazuRius et lazuLum.
On comprend aisément que c’est la permanence d’un firmament bleu au Moyen-Orient qui a poussé à donner à « azuréen » le nom de « bleu-ciel ».

VOTE
Le verbe latin dont ce mot est dérivé est vovere (=faire un vœu, promettre). Du supin on a tiré votum (=vœu, promesse). VŒU et VOTE sont donc doublets.
C’est ainsi qu’en votant pour un député, on fait le vœu qu’il agisse à notre place, en notre nom, selon ses promesses, à l’endroit où se décident les lois, cadre de notre vie. D’où crise politique lorsque les députés n’agissent plus selon le vœu de leurs électeurs. Et point question de désavouer son représentant au Parlement avant l’élection suivante où de nouvelles promesses viendront derechef caresser l’électeur.
Comme aux premiers temps le VŒU d’un fiancé de prendre femme valait promesse en échange de faveurs, la langue espagnole a dérivé son substantif boda ( B = V) de la même racine ( vota = pluriel de votum) pour exprimer le sens de « noce ». Par exemple lista de boda (=liste de mariage).

QUINTAL
L’origine est le grec ekaton (=cent) que l’on retrouve dans hécatombe qui était à l’origine le sacrifice de 100 bœufs (ce chiffre « cent » ayant, comme le nombre français 36 le sens de nombreux)
La racine apparaît également dans hectare ( 100 ares) et tous les autres éléments de mesure pour cent unités.
Les Arabes usaient du mot quintar dans leurs mesures de poids pour indiquer « cent ». C’est ainsi que dans la sourate IV du Koran au verset 24 sur les Femmes, il est écrit : » Si vous voulez répudier une femme, laissez-lui un quintar (c’est à dire cent pièces d’or)pour en prendre une autre » .
Mon voisin, boulevard Laurier, à Québec était obèse et quand les gens me parlaient de lui, ils disaient « Quintal.. . ».

FAUTEUIL
Ce mot vient du francique faldistohl, composé du substantif stol (=siège) que l’on retrouve dans l’allemand stuhl (=siège pour une personne), dans le russe stoul ou l’anglais stool, tous trois précisant une chaise debout, et du verbe germanique falden (=plier) ayant donné l’anglais fold (=plier).
Il s’agit donc à l’origine d’un siège pliable, et facile à transporter en voyage, sens que l’on retrouve dans l’espagnol ou portugais faldistorio, l’italien faldistoro et le latin décadent faldistorium. Mot que l’on retrouve encore au XVIIème s. pour désigner dans les églises le siège liturgique de l’évêque.
Notons que le faldistohl de l’origine n’avait pas d’accoudoirs, alors que le FAUTEUIL moderne est généralement plus confortable et dispose de bras d’où l’anglais armchair (= chaise à bras).

TEMPS
Ce mot nous vient du substantif latin polysémique tempus (= division de la durée, époque, situation, mesure, temps d’un verbe) qui ne présente pas plus de précision que son dérivé français TEMPS, alors que d’autres langues, au lexique plus riche, disposent de termes variés correspondant chacun à une acception différente.
Notons en outre qu’à la différence du latin le mot TEMPS peut aussi désigner l’état de l’atmosphère, voire s’il n’est pas qualifié, préciser l’indication d’une tempête ou d’un orage.
Le spectre sémantique est ainsi vaste entre le gros temps, la mi-temps, le contretemps et le passe-temps.
Les autres langues disposent de vocables différents. Ainsi l’anglais par exemple dit weather pour le temps qu’il fait, time s’il s’agit de la durée, tense s’il s’agit d’un verbe et stroke pour le cycle de fonctionnement d’un moteur à explosion.
De même l’allemand use-t-il de Zeit pour la durée, de Wetter pour la météo, de Tempo s’il s’agit de musique et de Tempus pour la conjugaison.

ADULTE
Ce mot est dérivé du verbe latin adolesco (=croître), lui même composé de la racine alo (=nourrir) que nous retrouvons par exemple dans le substantif français « aliment » et dans les adjectifs germaniques signifiant « vieux : old en anglais et alt en allemand.
Intéressant de noter que ce même verbe nous donne ADULTE par son participe passé (= celui qui a crû) ainsi que ADOLESCENT par son participe présent (=celui qui est en train de croître).
Ajoutons que les dérivés sont nombreux tel alumni en anglais pour désigner les anciens élèves d’une université ou alimony (=pension alimentaire), mais aussi en français avec prolifique (= qui a de nombreux descendants), prolétaire (=qui ne compte dans l’État que par ses enfants), altitude, haut, exalter.

MÉRULE
Ce mot s’emploie aussi bien au féminin qu’au masculin. Il désigne un champignon qui s’attaque sournoisement aux bois humides de charpente, les fait pourrir et les digère, leur enlevant toute résistance mécanique.
Des acquéreurs de vieilles maisons granvillaises dans la Haute ville en ont fait les frais qui durent, à grands frais, assainir les locaux par application de créosote (du grec kreas = chair, et sôzein =conserver, la créosote imprégnant les bois assure leur conservation).

DOUANE
C’est une branche de l’administration publique chargée de percevoir les taxes dues sur certaines marchandises soit à l’entrée, soit à la sortie d’un pays.
Le parcours du mot est intéressant : l’origine vient du mot persan diwan qui nous a aussi donné « divan ».
Si longs et interminables étaient les palabres, marchandages et tergiversations entre les fonctionnaires des Finances et les colporteurs que du sens de « registre » le mot persan diwan est passé en turc pour désigner le local où étaient gardés les registres, mais à Istanbul on aimait particulièrement le confort et le dit local était pourvu de tapis épais et coussins confortables, d’où notre « divan ».
L’arabe al-dwana passa à l’espagnol aduana en gardant l’initiale arabe, mais la perdit en passant à l’italien dogana et au français DOUANE.
L’allemand a Zoll , un mot qui de la mesure d’un pouce est passé aux droits de douane et cette racine germanique est celle du danois told et du norvégien toll, ce dernier mot courant en Grande-Bretagne et aux USA dans le sens de « péage ».
Seul les Anglais usent pour DOUANE d’un mot d’origine française customs qui rappelle notre « droit coutumier ».
Il n’est pas inintéressant de rappeler que le parcours par extensions successives du persan diwan est comparable au mot français « bureau » qui de la bure, étoffe recouvrant un écritoire, est passé au meuble, puis au local, puis aux membres s’y réunissant, etc.

OMBUDSMAN
C’est un mot des vocabulaires français, anglais, allemand, scandinave et même hongrois. De plus en plus de pays l’adoptent pour désigner le haut fonctionnaire que nous connaissons encore en France sous le nom de « médiateur » depuis 1973.
C’est au XVIème s. et en Suède que ce mot , vieux norrois d’origine, fut utilisé pour la première fois pour désigner ce plénipotentiaire indépendant chargé, dans les démocraties qui se respectent, de la défense du simple citoyen face à la rigueur glaciale de la loi. En Espagne il garde le nom de « défenseur du peuple » (defensor del pueblo).
Étymologiquement le terme germanique est composé de trois racines : um (=à propos), bodh (=commander) et madhr (= homme). C’est cette même racine indo-européenne (ambactos = ambi + actos = agissant autour ) qui est à l’origine du mot « ambassade ».
En France ce conciliateur , appelé « médiateur de la République » a depuis peu un(e) délégué(e) dans chaque Département.

SYBARITE
Ce mot, à l’origine, désigne l’habitant de la ville grecque de Sybaris, au bas de la Botte, sur le golfe de Tarente, détruite 500 ans avant J.C.. Fondée deux siècles plus tôt par les Achéens, elle fut célèbre à cause de la mollesse de ses mœurs, en rappel de la fille de Thémistocle qui se distinguait par sa volupté.
C’est contre ce style de vie luxueuse que le stoïque Sénéque, la personnalité la plus éminente de la littérature claudienne, s’insurgea.

ROBOT
Ce mot introduit en France en 1924 par l’écrivain tchèque Karel Capek, désigne un automate, un esclave mécanique, un ouvrier artificiel.
L’origine du terme est le slave robota (=travail forcé), que l’on retrouve dans le substantif allemand Arbeit (=travail) et dans le verbe russe rabotats (=travailler).

FOURCHETTE
Le mot , diminutif de fourche, est dérivé du latin furca, et originellement à deux dents comme l’était la première fourche.
Furca était surtout connu à Rome comme instrument de supplice, à cette époque où l’on mangeait avec les doigts, appelés encore au XIXème s. en France « la FOURCHETTE du père Adam ».
Les Anglais ont emprunté le mot sous la forme fork, les Italiens furca, les Allemands parfois Forke ( à côté de Gabel), les Portugais garfo, comme s’ils gaffaient les aliments dans l’assiette, les Espagnols horca (= fourche) en raison du chiasme consonantique F < > H, mais tenedor (= fourchette) , du verbe tener (= avoir , tenir , retenir), s’il s’agit de l’ ustensile de table.

NOCEBO
Ce mot désigne un phénomène psychosomatique souvent ravageur et pourtant mal reconnu. C’est en fait l’opposé du « placebo » qui lui manie l’euphémisme avec désinvolture.
Les deux mots sont des verbes latins au temps futur ( comme lavabo qui veut dire « je laverai ») : PLACEBO signifie je plairai, je serai utile, je servirai, alors que NOCEBO a le sens de je causerai du tort, je nuirai.
Une longue expérience et multiple fréquentation de la race humaine m’a convaincu que la majorité des maladies relèvent à 90% de la psychologie et à 10% de la somatique.
Ainsi tout comme le PLACEBO pharmacologique peut se définir comme une substance ( cachet, injection, comprimé, potion, etc.) dépourvue d’effet thérapeutique, l’effet NOCEBO peut se définir comme le placebo négatif, c’est à dire par une altération inattendue, souvent importante, de la santé d’une personne, à la suite de l’administration d’une substance inactive ou d’une simple conversation.
L’effet NOCEBO ressortissant non à la science, mais à la croyance, les tests ne donnent lieu à aucune publicité, alors que l’effet placebo, pourtant de même nature, a été souvent rapporté publiquement. J’ai rencontré en Chine une ancienne infirmière, devenue oncologue célèbre à l’hôpital n°1 (militaire) de Pékin qui m’a dit avoir guéri jusqu’à 30% de ses patients par la méthode placebo, ses encouragements ayant provoqué dans le cerveau des cancéreux une hausse de la dopamine et de l’activité opioïde.

VERTU
Si l’on prend l’étymologie à la lettre , c’est une qualité spécifiquement masculine car l’origine se trouve dans le substantif latin vir qui a bien le sens d’homme, en tant qu’être mâle, à la différence du mot homo qui désigne l’être humain en général et donc « embrasse » la femme. Seule la « petite vertu » semblerait seoir aux femmes.
On peut rapprocher ce mot de l’adjectif « hystérique » qui, à l’inverse, ne peut qualifier étymologiquement qu’une femme, l’origine étant le substantif grec ustera qui signifie utérus, matrice.
Ce qu’on appelle « virtualité » n’est que VERTU en puissance.
La racine originale est le latin vis qui signifie « force, vigueur, puissance, violence, vaillance , et courage », cette dernière qualité étant la première des vertus romaines.
Un des multiples dérivés est virus qui désigne aussi bien le suc, l’humeur que le venin. Virgula , autre dérivé, désigne une petite verge.
Consolez-vous, gentes dames, même chez les Latins, VIRTUS est du genre féminin.

GÉSINE
Ce mot est la substantivation du verbe « gésir » que la plupart des gens ne connaissent que sou la forme de l’indicatif présent à la 3ème pers.du sing. : gît, notamment sur les pierres tombales des nécropoles : « Ci gît »
Le verbe « gésir » ( NB « gir » n’existe pas , même si on l’entend à la télé de la bouche de pros de la langue française) est dérivé du latin jacere (= être étendu). Il est défectif et rarement utilisé en dehors du présent, de l’imparfait et du participe présent.
« En GÉSINE » se disait il y a fort longtemps d’une femme en couches. La Fontaine a écrit d’une « laie en gésine ».
Certains hôpitaux de province désignaient autrefois de ce mot la salle où l’on plaçait les femmes sur le point d’accoucher. En G.B. et aux USA cette salle est appelée de nos jours : « Travail room ».

SYCOPHANTE
Un terme certes peu usité. C’est le titre de l’ouvrage que vient de publier un collègue de mon alma mater, l’université de Caen, qui m’incite à en donner l’explication.
Les deux racines qui composent ce mot sont grecques :
Sukon (=figue) dont sont dérivés ficus en latin, « figue, figer et foie » en français,, Feige en allemand, fig en anglais, et higo en espagnol ( selon le chiasme consonantique F < > H .
Fantês , du verbe faïnô (=je découvre) dont sont dérivés par exemple phénomène et Épiphanie.
Le sens de SYCOPHANTE est « délateur professionnel ».
L’un des arbres sacrés de la Grèce antique était le figuier dont il était interdit de cueillir les fruits. Toute infraction en la matière était punissable et Solon avait créé un corps de fonctionnaires, payés à la commission, dont le rôle était de dénoncer les voleurs de figues.
Le livre de Gérard-Denis FARCY a pour titre Le sycophante et le rédimé, et pour sous-titre Le mythe de Judas. C’est à la suite de celles de Claudel et de Borges une thèse sur le douzième Apôtre de Jésus, au destin unique.

PORNOCRATIE
Comme pour tous les mots à suffixe «-cratie », (du grec kratia = pouvoir ), il s’agit de gouvernement. Cf. démocratie ( par le peuple), aristocratie (par les meilleurs), ploutocratie (par les riches), autocratie (par soi-même).
La racine grecque pornè signifie « prostituée ». À Athènes le mot pornoboskos désignait le tenancier d’un bordel, le proxénète.
En français PORNOCRATIE désigne un régime dans lequel les courtisanes, les femmes ont une forte influence sur les gouvernants. On peut ajouter qu’à notre époque où les media sont presque devenus le premier pouvoir réel, une sorte de PORNOCRATIE règne sur le petit écran.
Le mot dans l’histoire s’est notamment appliqué à cette période du Xème s. où les papes, sous l’influence de leurs maîtresses, s’adonnaient au népotisme.

POT DE VIN
Terme qui au figuré s’employait à l’origine, c’est à dire au XVème s. , comme récompense d’un service rendu.
Dès le siècle suivant le glissement sémantique en a fait une expression péjorative, à savoir le versement illégal d’argent en vue de corrompre. C’est de nos jours le mal du siècle !
Avec cette acception le russe a vziadka (= mettre la main sur quelqu’un), l’italien bustarella (=petite enveloppe), l’allemand Schmiergeld (= argent servant à graisser), l’anglais backhander (=ce qu’on passe par derrière), l’angloricain payola (=paiement indirect).
L’espagnol dispose de trois mots : un terme d’origine latine propina (= donner à boire), et deux termes d’origine arabe adehala (=portion reçue) et comision alboroque où on retrouve la racine sémitique « burûk » (= cadeau), apparaissant dans baraka (=bénédiction) , Barack l’Américain,, Moubarak l’Égyptien et Barak l’Israélien.
Mais le plus curieux est le mot turc echantyon (=pot de vin), de toute évidence et hypocritement emprunté au français, alors que très souvent les Français usent du mot turc bakchîch.

FERME
Le substantif nous vient de l’adjectif latin firmus (=solide, résistant, ferme, sur quoi on peut compter) et du substantif firma (=la ferme), dérivés du verbe firmare qui a le sens aussi bien d’affermir, affirmer, confirmer, assurer que d’affermer, c’est à dire « louer à ferme ».
D’où les dérivés affermage, fermage (=loyer d’une ferme), fermette, fermier (= celui qui tient à ferme un droit, celui qui exploite des terres).
L’anglais dit farm, alors que dans l’est des Etats Unis d’Amérique une ferme s’appelle grange . L’espagnol dit granja , qui , comme en américain, comporte l’acception du « grain » à l’instar des mots français « grange et grenier ».

SYNDICAT D’INITIATIVE
Surprenante appellation pour ce bureau en principe créé pour renseigner et guider les visiteurs étrangers à la région, de France ou d’ailleurs, vers ce que la cité offre d’intéressant, de beau, d’original, de nouveau.
- SYNDICAT, d’origine grecque, signifie étymologiquement « usage courant » dans la perspective de défendre l’intérêt général. Paradoxalement ce terme apposé à « initiative », si l’on se reporte à l’Athènes antique , sous la forme sundikos, désignait ironiquement le membre d’une commission chargée de défendre les lois établies CONTRE toute initiative novatrice.
- INITIATIVE , dérivé du verbe latin initiare (= être le premier à proposer) est un mot qui en français désigne « une disposition à entreprendre », une capacité de décision. Si la racine a servi, en anglais, avec le verbe initiate (= commencer), son utilisation en français avec le même sens, sous la forme « initier » est erronée. Le vocable adéquat à employer est soit commencer, soit amorcer, ou selon le contexte promouvoir, engager, entreprendre, lancer, inaugurer, instaurer. En effet INITIER en français signifie « introduire à la connaissance » comme on initie quelqu’un aux mystères d’une religion, ou aux arcanes d’une langue par exemple.
Quoi qu’il en soit l’appellation SYNDICAT D’INITIATIVE ( ou d’initiatives) s’avère absurde, voire saugrenue ou ridicule. D’autant plus que le local est souvent fermé le dimanche, le jour par excellence où les gens voyagent pour la distraction. J’approuverais en revanche le terme « office de tourisme ».

HALLOWEEN (31 octobre)
C’est une tradition celtique chrétienne importée aux Amériques par les Irlandais qui l’appelaient, en anglais, All Hallows’ Eve (= veille de tous les Saints). Inconnus en France au siècle dernier, le mot et la tradition se sont vulgarisés dans nos écoles.
De fête religieuse à l’origine, la tradition s’est à ce point commercialement mondialisée , avec ses citrouilles chinoises et ses chauve-souris thaïlandaises qu’à l’instar de l’évêque d’Auxerre qui, en décembre 1952, brûla les effigies du Père Noël devant sa cathédrale, la presse sérieuse française jette chaque année l’anathème contre cette coutume aussi païenne que morbide.

RESPECT
Quel beau mot ! Et d’autant plus joli, agréable à voir, doux à entendre, qu’il rappelle le bon vieux temps, maintenant que la désuétude le guette.
Composé de deux racines latines :
SPECT vient du verbe spectare (=regarder, considérer, tenir compte de) et le préfixe RE qui signifie « en arrière ».
Dostoïevski, écrivain russe plein de sagesse et de lucidité qui mérite la comparaison avec nos philosophes classiques, écrivit avec raison : « Toute société pour survivre a besoin de respecter quelqu’un ou quelque chose ». Avant la lettre, il était en quelque sorte ( et non « quelque part » s’il vous plait) adepte de l’ écologie.
C’est pour le malheur de la jeunesse, ce qu’oublient nombre de parents et qui pis est beaucoup d’enseignants, les parents par le mauvais exemple, les enseignants en oubliant par exemple d’apprendre aux enfants à respecter notre langue.
Même le respect humain se perd. Faute de repères rappelés inlassablement, la place est laissée à l’insolence, au dédain, au mépris.
Quand reverra-t-on au tableau des écoles : « il faut respecter la nature, le travail des autres, les anciens, le silence,. . .la loi ; » ?
Pas de lien social, pas de société sans respect. L’oubli du sacré engendre la violence.
Ironiquement c’est par exemple la crainte des adolescents des ghettos de perdre le respect des autres qui les poussent à la violence.
Notons qu’en anglais RESPECT s’exprime souvent par regards qui en set son doublet .

AMAZONE
Ce mot est source de conflits entre linguistes.
S’il s’agit du plus long fleuve du monde, le navigateur espagnol Francisco de Orellana l’a nommé ainsi en 1542 en usant de la langue tupi locale, des deux racines ama sumu signifiant « grande vague », son aspect ressemblant à une mer plutôt qu’à un cours d’eau.
S’il s’agit de cette race de femmes fabuleuses, guerrières et chasseresses farouches, originaires d’une région située entre le Caucase et la Scythie, le mot aurait été formé sur les deux racines grecques signifiant « sans sein » ( mazos = sein, précédé de l’ « A » privatif). En effet on prétend qu’elles se brûlaient un des deux seins pour se faciliter le tir à l’arc et qu’elles éliminaient les mâles à la naissance, ne gardant que les meilleurs comme géniteurs futurs.
Une troisième thèse du début du XIXème s. rattache AMAZONE à l’italien maschio (=mâle), suivi de la préposition/adverbe privatif allemand ohne (=sans) pour désigner la femme sans homme.

ENVI ( à l’ )
C’est l’erreur fréquente de personnes écrivant « à l’envie » qui m’incite à préciser que la seule formulation correcte est « à l’envi », sans « e », du verbe « envier » qui comprend le sens de rivalité, de « à qui mieux mieux », de défier au jeu, même si l’origine sémantique de ce mot est la même que celle du substantif « envie » (= jalousie, désir).
Précisons que ce dernier mot n’étant pas adjectif, y adjoindre l’adverbe « très » est également fautif. On a « grande envie » (comme grande faim, grande peur) et non « très envie » ( ni très faim, très peur).

PERSIENNE
Oui, Mme Lasblez de Caen, vous pouvez de nos jours utiliser comme quasi-synonymes « PERSIENNE-VOLET-CONTREVENT », mais chacun de ces trois mots a une sémantique et une acception originale différente.
Chez vous, surtout si votre maison se situe face au violent et froid Éole septentrional qui vous aère de la mer de la Manche, le mot adéquat est certes CONTREVENT, qui s’explique de lui-même comme grand volet de bois s’ouvrant et se fermant du côté extérieur de la fenêtre et qui sert à vous garantir du vent et de la pluie, éléments non rares en Basse-Normandie.
Le VOLET qui en principe n’est pas solidaire des montants ou jambages, d’où son nom dérivé du verbe « voler » c’est à dire non scellé, et qui se ferme du côté intérieur de la fenêtre.
Quant à la PERSIENNE, qui nous vient de Perse ( Iran actuel), gorgée de soleil et chiche en pluie, à la différence d’un contrevent, elle est formée de lamelles soit horizontales, soit verticales, disposées en abat-jour, fixes ou mobiles, qui rompent la lumière vive tout en permettant à l’air d’entrer.
Dans le même registre précisons que la fenêtre se nomme quelquefois croisée, désignant le châssis ouvrant et vitré qui ferme la baie. Et je clorai le sujet en rapprochant la première syllabe de FENêtre de VENT, en vertu du chiasme consonantique « V < > F », du « foehn » ( c’est ainsi que « vent » se dit en chinois mandarin) alpin, également de l’espagnol VENTana (= fenêtre) et de l’italien FENestra pour le pan latin de la famille linguistique indo-européenne et de «window » (=fenêtre) pour le pan germanique.

ÉTOILE
Le mot vient du grec astèr qui signifie « éclair » Cf l’adjectif sterops (=qui lance des éclairs). C’est l’origine qui est donnée à la racine indo-européenne induite STER- (parfois STEL-) et que nous retrouvons dans le français « astre »,et la fleur « aster », mais aussi dans l’anglais star et l’allemand Sterne, ces deux derniers termes ayant le sens d’ÉTOILE. Mais également dans « astérie » (étoile de mer), astéroïde (en forme d’étoile), astérisque (petite étoile), et la foule de composés ayant ASTRO- comme préfixe tels que astrologue, astronome, astrolabe, astromancie.
Le latin sterla est devenu stella,( qui a donné l’italien stella et l’espagnol estrella) d’où nous vient « stellaire » et « constellation » ainsi que l’irlandais stell et le brittonique ystuyli. C’est là que se trouve également l’origine du prénom Estelle.
Au figuré l’ÉTOILE est parfois une vedette ou encore une star.
Le mot a donné lieu à de multiples expressions du genre « avoir foi en son étoile » ou « être né sous une bonne étoile », le contraire étant « sous un mauvais astre », soit malOTRU. C’est alors le désASTRE.

PEUR
La sémantique nous indique l’idée de « frapper » et nous mène au verbe grec paiô (=battre, frapper) dont est dérivé le verbe latin pavire (=aplanir à force de coups, niveler, damer), qui n’est que le doublet du verbe pavere (=être troublé, craindre, redouter, avoir peur). Tacite écrivait Mihi paveo pour dire « j’ai peur pour moi ».
Le substantif latin pavimentum (=terre battue, pavé) a donné le français « pavé » et l’angloricain pavement qui en Grande Bretagne signifie « trottoir », le pays soignant particulièrement les piétons, et aux Etats-Unis « chaussée », la civilisation de l’automobile oubliant celui qui va à pied.
On nomme « impavide », de la même racine, celui qui ne se laisse pas ébranler par la peur, qui est même intrépide. Lespagnol dit pavor et l’italien pavura pour exprimer la peur.
Après chisame consonantique ( P < > F ) la branche germanique exprime PEUR par fear en anglais et Furcht en allemand. Alors que le russe dit strak.

STÉVIA
Les descendants de Mayas chez qui je séjournais récemment à San Pedro de Belize me proposèrent, pour sucrer mon café, un brin séché d’une herbe verdâtre. Quand j’en demandai le nom, ils me montrèrent le paquet dont l’étiquette indiquait cañamo aguanoso que je ne puis traduire que par « chanvre d’eau
Il s’agit d’un édulcorant naturel puissant ( 30 fois le pouvoir du sucre, paraît-il) qui n’a pas le goût amer de la saccharine, ni les inconvénients dangereux de l’aspartame. Comment se fait-il que la médecine et les pharmaciens français ne le recommandent pas à leurs patients souffrant d’hyperglycémie ou du diabète ? Peut-être le lobby sucrier fait-il pression . Notre fille précise que le labo californien ChromaDex d’Irvine USA où elle habite le commercialise.
Il semble que ce succédané du sucre m’a déjà été proposé en Chine, mais sous forme liquide. Une goutte suffisait pour sucrer une grande tasse de thé rouge.
Rentré en France j’appris d’un marchand, expert en produits naturels, que le nom STÉVIA venait de l’inventeur espagnol Pedro Esteve et que cet édulcorant était utilisé depuis des millénaires par les Indiens guaranis sous le nom de ka’a cirete (= herbe de miel). Et il me souvient en effet avoir vu ce produit sur les rayons d’une herboristerie au Paraguay, mais sous le nom ka’a he’e (=feuille douce).
Un botaniste de rencontre m’a indiqué que les rébaudiosides contenus dans la STEVIA avaient, comme la saccharine, un pouvoir sucrant 300 fois supérieur au sucre et que les feuilles pouvaient se consommer fraîches, séchées ou cuites.

MANDORLE
C’est une figure en forme d’ovale ou d’amande dans laquelle s’inscrivent des personnages sacrés, le Christ, la Vierge, les saints. Par exemple la Vierge en majesté dans le retable en albâtre sculpté du Musée de Cluny.
La symbolique – la mandorle étant composée de deux cercles entrelacés où l’endroit d’intersection forme un cercle dans lequel s’inscrit le personnage – est le passage du monde terrestre au monde céleste, le personnage servant de médiateur.
Le mot fut emprunté à l’italien mandorla (= amande), lui-même dérivé du grec amigdalon (=amande) d’où nous viennent amande et amygdale.

MARCHE
Le mot a une origine germanique ( du francique marka )même si l’un des dérivés est le latin marcus (= marteau)
C’est soit le déplacement régulier et ordonné , par exemple d’un détachement militaire, soit le degré d’un escalier.
Le terme est également synonyme de « marge, frontière » dans des expressions telles que « les marches de Bretagne ».




POLYNÉSIE
La racine -NÉSIE nous vient du grec nèsos qui signifie « île », parfois presqu’île. Quant au préfixe POLY- , il est aussi du grec polus qui signifie « nombreux ».
C’est ce dernier mot qui est à l’origine du substantif grec polis (=la ville) et des dérivés français police, politique, acropole, etc., indiquant que, contrairement à la campagne, la ville regroupe de NOMBREUSES personnes.
On retrouve ses dérivés jusqu’en Asie ( famille des langues indo-européennes) , par exemple sous la forme PURI ou POUR en sanskrit, cf. SingaPOUR (=ville du tigre, c’est à dire du roi), mais aussi BOURG en français, Burg en allemand, borough en anglais ou boro en angloricain.
Notons que POLYNÉSIE désigne cette région au centre de l’océan Pacifique parsemée de nombreuses îles s’étendant de Hawai au nord, à la Nouvelle-Zélande au sud et de l’île de Pâques à l’est aux Fidjis à l’ouest. Précisons qu’en langue tahitienne « île » se dit motu, d’où les noms terminés en –motu tels que Tuamotu ( tua = haute mer).
Rapprochons de POLYNÉSIE les mots Mélanésie ( le grec méla signifie « noir ») ou îles des communautés les plus noires avec Iran Jaya, et Micronésie (le grec micro signifie « petit ») avec les îles Carolines, membre de l’ONU depuis 1991.

PAS
Ce substantif est dérivé du participe passé du verbe latin pandere (=étendre, déployer, ouvrir, écarter les jambes) à savoir passus.
Il désigne soit le mouvement fait par l’homme pour marcher, soit l’empreinte laissée sur le sol par ce mouvement, soit enfin la mesure de longueur, qui sera plus tard appelée «pied » ( 31 cm environ) que les Britanniques emploient couramment sous la forme foot.
C’est, par extension, le passage par lequel on fait mouvement, notamment dans des expressions comme « le pas de la porte » , ou dans le jargon commercial « le pas de porte ».
L’anglais, plus précis, use des mots step ou footstep pour le bruit, footprint pour la trace laissée, pace pour la distance ou le rythme par ex. « pacemaker » (=stimulateur cardiaque), ou tread pour la démarche.
L’espagnol dit paso , comme dans ceda el paso (=laisser la priorité) ou « paso-doble » pour la danse.
À noter que le substantif PAS est devenu adverbe au XVIème s. en qualité de forclusif, auxiliaire discordentiel de la négation « ne ».
Parmi les dérivés citons « COMPAS », du latin cum (=avec, qui se rejoint) et passus (=pas), à savoir compassus (=cercle, circuit) c’est à dire « espace délimité par des pas », un symbole permanent de la confrérie maçonnique où il convient « d’agir par règle et par compas » c’est à dire avec exactitude et circonspection.
Le COMPAS comme terme de navigation maritime est presque synonyme de boussole. Inventé par les Chinois, il indique le Nord magnétique. Le compas gyroscopique présente sur le compas magnétique l’avantage d’indiquer le Nord vrai, mais il coûte beaucoup plus cher .
Précisons enfin que l’anglais use du mot compass pour « boussole » et du mot compasses pour « compas », eu égard à l’écartement de deux « jambes ».

ALAMBIC
Voici un des 300 mots empruntés par le français aux Arabes qui l’avaient eux-mêmes emprunté au grec.
En l’an 58 de notre ère le médecin cilicien P.Dioscoride écrit dans son ouvrage « De materia medica » (=de la matière médicale) qu’il utilise pour ses expériences de distillation un vase de forme conique pourvu d’un bec . Or il appelle ce vase ambix.
Son livre ayant très tôt circulé dans le monde musulman arabophone, le mot s’arabisa en al-ambix, instrument fort utilisé en alchimie (autre mot d’origine arabe).
En espagnol il est devenu alambique, en italien lambico, en néerlandais lambiek, alors que l’anglais dit still et l’allemand Abziehblase.
Quant au participe passé « alambiqué », on comprend aisément à la vue du serpentin que comprend l’instrument son emploi métaphorique par Bossuet en 1680 pour qualifier un style , et par Montaigne un siècle plus tôt.

GLOSSOLALIE
C’est le phénomène par lequel une personne parle les langues étragères sans les avoir apprises.
Le mot se compose de deux racines grecques :
Glôssa (= pointe, puis par extension langue en tant qu’organe ou idiome) Le mot peut également s’écrire glôtta , comme dans polyglotte.
Lalos (=bavard) Cet adjectif se retrouve dans le prénom féminin « Eulalie » (= qui parle bien) et est dérivé du verbe laleô (=babiller, bavarder, parler).
Les ACTES rapportent que les Apôtres sur qui descend le St Esprit le jour de la Pentecôte eurent le don de GLOSSOLALIE.

JUIN
Certains voient l’origine de ce mot dans le nom d’une gens latine, celle de Junius Brutus, premier consul romain et fondateur de la République, en 509 avant .JC, après le bannissement du troisième roi étrusque Tarquin le Superbe .
D’autres la trouvent en IVNO (Junon) la déesse italique, pendant de l’Héra grecque. D’autres enfin tirent le nom JUIN des juniores (= les jeunes) pour les distinguer des majores (=les vieux) du mois de mai.
Mais tout s’expliquant, la sémantique nous mène au latin juvenis (=jeune) dont les dérivés sont multiples dans toutes les langues de la famille linguistique indo-européenne par exemple dans le français jeune ou jeunesse, l’anglais young ou youth, l’allemand Jugend ou jung, le russe iounii ou iounost , voire le breton yaounki.
La mythologie antique nous apprend que Junon, fille de Rhéa et Saturne, est à la fois sœur et épouse de Jupiter . La statuaire la représente souvent voilée, symbolisant le mariage, et une pomme de grenade à la main en signe de fécondité.
La Révolution française fit de JUIN partie prairial , partie messidor. Ironique quand on pense que Fabre d’Églantine (Il pleut, il pleut bergère. . . ) qui , à l’instar de son collègue le Conventionnel abbé Grégoire pour les patois, voulait en finir avec le grec et le latin , « nauséabonds oripeaux » de l’Ancien régime – révolution culturelle oblige - créa, en 1793, ce mot « messidor » sur le latin messis (=moisson) et le grec dorôn (=don). Comble du paradoxe ce sont ses amis Révolutionnaires qui adoptèrent le mot « veto » ,(= je m’oppose) pure création latine.
C’est en JUIN que se situe le solstice d’été , entre le 17 et le 25 où « SOL STAT » (=le soleil s’arrête) disent les astronomes, donnant prétexte à de multiples et colorées fêtes dans tous les pays de l’hémisphère boréal (feux de la St Jean, nuits blanches de St Petersbourg) .
C’est en JUIN que les agriculteurs s’inquiètent « Quand il pleut à la St Médard, . . . » Précisons que ce dicton remonte bien avant le calendrier grégorien. En effet quand ce dernier fut établi en octobre 1582, le calendrier julien s’adaptant mal à l’année solaire , on supprima les fêtes de douze saints, ce qui avança de douze jours la St Médard, autrefois fêtée le 20 juin , époque où les conditions météo ensoleillées variant peu, s’il pleuvait à cette date, la pluie avait quelque chance de durer.
Terminons en citant l’une des épithètes de Junon, à savoir Juno MONETA, à Rome dont le temple construit en 343 avant JC, sur la citadelle du Capitole ( aujourd’hui site de l’église S.Maria de l’Ara Coeli) abritait l’Hôtel de la Monnaie. C’est de moneta que nous viennent monnaie et monétaire en français, mint en anglais, moneda en espagnol, Münze en allemand, tous ces mots désignant l’ Hôtel de la Monnaie dans chaque pays respectif.

ÉLIXIR
Le mot, avec son initiale « al » , fait partie des 300 mots que nous avons empruntés à l’arabe. Mais son origine se retrouve dans l’adjectif grec xeron (=sec), ayant donné le substantif xérion (=médicament sec).
Les alchimistes arabes en firent la pierre philosophale.
Il a fallu qu’un potard espagnol la liquéfiât pour en faire un sirop aux vertus magiques, surnommé « or potable » ou élixir de longue vie.
Les Italiens l’appellent elisir, les Allemands Elixier. Anglais et Espagnols usent du mot français.
Le mot est à rattacher, il semble, au latin serenus (=pur, serein) et au français « xérographie » qui désigne un procédé de reproduction à sec.

PSYCHOTROPE
Ce terme se compose de deux racines grecques : le substantif psukhé (= souffle de vie, âme) et le verbe trepein (=tourner, changer, diriger).
Le mot qualifie des substances qui influent sur le mental, qu’elles soient naturelles comme le café, le thé, le cacao, le chanvre indien, le tabac ou l’alcool, ou de composition pharmaco-chimique comme tous ces médicaments si en faveur près de la population française telles que les barbituriques, les tranquillisants, les antidépresseurs ou les amphétamines.

COCCINELLE
Le mot est dérivé du latin coccinus , adjectif dénotant une couleur d’écarlate. Employé au neutre pluriel (coccina) veut, par extension, dire « vêtement d’écarlate ».
La racine originale est le grec kokkos (=pépin de grenade, donc rouge), qui a donné l’italien cocco (=cocotier ou chouchou), mais ce mot désigne également chez Pline, sous la forme coccum, le kermés, sorte de cochenille femelle dont la protection qu’elle assure à ses œufs sert à fabriquer la teinture rouge. Le mot kermés nous est venu de l’arabe al-kirmiz (=cochenille) via l’espagnol alkermes, origine des mots français carmin et cramoisi.
La qualité colorante a également incité les Latins à utiliser le mot coccus au masculin pour désigner le coq en raison de la couleur de sa crête ainsi que pour qualifier, en composition, la prune lorsqu’elle est rouge, sous la forme coccymelum ( melum =fruit).
Curieusement cet insecte a reçu divers noms selon le pays. Ainsi en France on l’appelle souvent « bête à bon Dieu », alors qu’en russe c’est boja karovka (= petite vache de Dieu) et en hébreu , nommer Dieu étant tabou, parat moshe rabënu (= vache de notre maître Moïse).

TABOURET
C’était à l’origine un petit siège circulaire sans bras ni dossier. Mais auriez-vous deviné qu’il partageait son étymologie avec « tambour » ?
Son origine est le persan tabir, un mot que les Arabes ont importé en Europe sous la forme al-tabül.
Curieusement les Espagnols ont oublié l’article arabe « al- », alors que le français du XVIème s. le gardait, sous la forme atabal .
Tambour se dit tabeur en wallon, tanburo en italien, Trommel en allemand et drum en anglais.
C’est l’influence latine avec le nom tympanum (=tympan), dérivé du grec tumpanon qui a introduit , sans raison, la nasale « M ».
Le tambour, en tant qu’instrument « musical » de percussion remonte à la nuit des temps, notamment aux origines des civilisations africaines (cf. tam-tam)
Concluons en ajoutant que la racine originale de TABOURET, en plus de « tambour » est également celle de « timbale », par croisement avec cymbale et timbre.

ARDENT
C’est un emprunt au participe présent du verbe latin ardere qui signifie être en feu, brûler, resplendir, être violemment enthousiaste. Le mot s’avère plus littéraire que « brûlant », comme dans une brûlure ardente, une fièvre ardente, une soif ardente.
La racine originale se trouve dans le latin arere (=être sec, desséché), dérivé du sanskrit asa qui signifie « cendres » d’où viennent le vieil allemand asca (=cendres), le grec azein (=sécher), le tchèque ozditi.
C’est cette même racine qui nous a donné « azalée », placée par Linné dans la famille des Éricacées, eu égard au peu d’eau qu’exige cette plante.

VERLAN
Votre correspondante a raison Mme Lepaumier de Caen. Ce mot n’est pas l’anagramme de « langage vert », mais tout simplement l’inversion des syllabes de « l’envers » pour obtenir « vers-l’en », écrit VERLAN.
Le procédé ne date pas d’hier. Au XVIème s. « Bonbour » existait pour Bourbon. Au XVIIIème s. Louis XV était parfois nommé « Sequinzouill » et au XIXème s. les bagnards de Toulon se disaient pensionnaires de « Lontou ». Précisons qu’à l’origine le VERLAN était le code secret des prisonniers de droit commun.
Et il ne s’agit pas d’argot car celui-ci est une création des ouvriers d’un même corps de métier, dont Céline et A.Boudard ont donné de croustillants exemples dans leurs œuvres. Alors que le VERLAN est un code linguistique des banlieues de grandes cités
On peut cependant dire que l’un et l’autre répondent à la même double motivation : secret de connivence puisque compréhensible des seuls initiés, et ludique car jouant sur les mots.
Le VERLAN répond en outre à une pulsion d’ordre identitaire, compensatoire dans les communautés frustrées d’une exclusion soit raciste, soit pour l’accès au travail.
Le chanteur Renaud use du VERLAN avec « Laisse béton » (= laisse tomber), mais c’est le rap qui a surtout vulgarisé le VERLAN des marginaux.
Même si le VERLAN est une langue surtout orale, il est patent que l’usage du SMS l’a généralisé. Au point que son succès a presque réussi à faire oublier le mot qui est à son origine. Ainsi, oubliant que « jobard » a donné « barjo », l’un de mes étudiants ne m’a-t-il pas avoué croire que « jobard », un mot qu’il rencontrait pour la première fois, était le VERLAN de « barjo ».
Si le VERLAN est très ancien, il n’est pas l’apanage de notre sele langue. Je la’ai rencontré en Argentine où on le nomme « lunfardo » en espagnol, mais aussi en Irlande et en Froatie.
Pour clore je vous précise que FLIC, mot remontant au XVIème s., n’est pas du verlan. La forme verlan de flic est passée par divers avatars : flikeu, puis keufli, et enfin keuf. . . pour le moment.

BELETTE
Avec son suffixe féminisant, ce joli mot désigne en fait le « belle petite », sous-entendu bête. En ancien français belet était diminutif de « beau ».
Ce mammifère fauve au ventre blanc est le plus petit des carnivores. La beauté de sa robe, et la joliesse de son mouvement ne peuvent cacher les dégâts qu’elle cause dans les basses-cours.
Et curieusement cet euphémisme superstitieux se retrouve dan la plupart des langues : Mauswiesel en allemand, least weasel en anglais, mustela nivalis en espagnol, lasica en croate, lasca malaïa en russe, etc.
À Rome la BELETTE se nommait mustela,mot repris par l’italien sous la forme mustella et par les zoologues qui en ont tiré le nom de la famille des Mustélidés, qui comprend aussi bien l’admirable vison que la puante moufette. Le dialecte champenois l’appelait mosteille avant que le mot ne devienne tabou.
On ne peut que le rattacher au grec mous et au latin mus, tous deux ayant le sens de souris, mulot, ainsi qu’aux dérivés français « musaraigne », anglais (mouse), allemand (Maus) et russe (mouich).

PHYLOGENÈSE
Évolution de l’espèce, cette spécialité de la biologie traite du mode de formation des organismes vivants. Le mot est composé de deux racines grecques : fulè (=espèce) et guénésis (=naissance).
La phylogenèse, même si le naturaliste Ernst Haeckel y voit un parallèle, se différencie de l’ « ontogenèse » (onto : forme du verbe grec signifiant « être ») qui traite du développement de l’individu.
Tout philologue conscient et objectif, à l’exemple de l’Allemand August Schleiger reconnaît que les langues sont des organismes naturels qui naissent, croissent, se développent, en un mot vivent. Mais à la différence de ce linguiste de Weimar je pense que les langues sont la seule espèce vivante qui ne meure pas. Il me semble erroné d’appeler par exemple le latin langue morte. Je pense qu’il s’agit plutôt d’une langue ancienne, sortie de l’usage oral. Les écrits restent. Il suffit de les faire revivre pour communiquer.
Deux exemples probants peuvent étayer mon témoignage :
-En prenant la présidence du Conseil de l’Europe le 1er juillet 2006 la Finlande a eu ce trait de génie d’utiliser le latin, seule langue européenne dénuée de tout « colonialisme » ou impérialisme culturel.
-La résurrection de l’hébreu par le savant lexicographe Ben Yehuda en 1915. Une initiative qui permet, en trois ou quatre mois, à des Israélites de toutes nationalités, et aux non-juifs qui le souhaitent, d’apprendre à s’exprimer dans une langue oubliée depuis des millénaires.

ANOSOGNOSIQUE
Ce mot se composer de trois racines grecques :
-gnosique, du grec guignoscô (=savoir, connaître), également racine du mot « ‘agnostique » = celui qui ne sait pas),
- noso de nosos (=maladie), et
-« a », qui n’est que le préfixe négativant.
L’adjectif décrit donc la personne inconsciente de son état morbide, autrement dit quelqu’un ignorant qu’il est malade. Quel humoriste a dit : « L’homme bien portant est un malade qui s’ignore » ?
On pourrait presque dire que l’ ANOSOGNOSTIQUE est l’opposé de l’hypocondriaque qui, lui, vit dans la crainte pathologique des maladies.

RIRE
Si les gens savaient le bénéfice thérapeutique du RIRE, ils diviseraient par cent leurs achats de médicaments et civiquement soulageraient, partant, la charge de la Sécurité sociale.
Je ne parle pas de l’effet de chatouilles ou du protoxyde d’azote, mais de la contraction d’une douzaine de muscles faciaux et des spasmes respiratoires dus à un réaction face à ce qui est drôle, à ce qui paraît incongru, bizarre, inattendu. Cette décharge bruyante d’énergie nerveuse oxygène le sang, réduit le stress et renforce le système immunitaire, en détournant souvent l’attention du censeur intérieur.
Le mot vient du verbe latin ridere dont la sémantique s’étale de rire dans le sens de se moquer, à rire dans le sens de sourire. Dans toute ma carrière d’enseignant, j’ai suivi le précepte d’Horace : Docere ridendo (=enseigner en amusant). Ce qui m’a incité à poursuivre mon activité,au delà du seuil de la retraite, par plaisir objectif et subjectif, serait-ce bénévolement.
Au verbe ridere d’origine obscure, correspond le verbe grec gelaô (=briller, rire) dont est dérivé l’adjectif français « agélaste » qui par son préfixe privatif « a » qualifie une personne qui ne sait pas rire, ou qui ne rie que lorsqu’elle se brûle.
Les langues germaniques expriment RIRE par le seul bruit fait et tirent leurs verbes du grec klôzô d’où laugh (=rire) en anglais ou lachen en allemand.
Mieux que S.Freud, Bergson a écrit sur le RIRE, considéré comme stase de la vie. En effet RIRE empêche de vieillir et quoi de mieux au fond que mourir de rire ?


BACON
Ce mot est d’origine francique ( germanique) mais a été employé pour la première fois en France, sous la forme bakko dans le Roman de Renart , à la Branche XVII, à la suite d’Isengrin et la jument, sous le titre le Bacon enlevé , en français contemporain, et ce, au XIIème s., avant que Rabelais ne le mentionne quatre siècles plus tard.
L’étymologie nous mène à l’anglo-saxon boec ( = dos) , devenu back en anglais, mais avant cela bakon en vieux français pour désigner la viande tirée du dos du porc.
Passé plus tard en Angleterre le mot avec le sens de « jambon » , nous est revenu au XIXème s. pour désigner le lard de poitrine salé.

ÉNANTIOSÉMIE
C’est en linguistique la coprésence des contraires. Freud nous fit découvrir que l’ÉNANTIOSÉMIE est sous-jacente dans le lexique, la syntaxe et même la sémantique. Un terme qui peut dire à la fois quelque chose et son inverse.
F.de Saussure utilisant la métaphore de la feuille de papier où le recto symbolise le signifiant (la pensée) et le verso le signifié (le son), a déclaré : « Le signe linguistique est une entité psychique à deux faces ».
Par exemple alors que le latin propose clairement cantus et campus, le français traduit par « chant » et « champ ».
Plus flagrant nous avons « hôte » ( celui qui reçoit) et hôte (celui qui est reçu) alors que l’anglais propose host et guest. Ou encore le verbe « apprendre » qui peut vouloir dire « enseigner » ou « étudier ». Le verbe « louer » complique encore les choses car en plus des deux sens énantiosémiques dont les sujets peuvent être soit le loueur soit le locataire, est vraiment polysémique lorsqu’il signifie « faire l’éloge, vanter « .
De même l’allemand avec le verbe leihen qui signifie à la fois prêter et emprunter.
L’ÉNANTIOSÉMIE se retrouve également dans le verbe anglais dust qui signifie soit dépoussiérer, soit empoussiérer.
Précisons que le mot ÉNANTIOSÉMIE vient de deux racines grecques : enantios (=qui est en face, contraire, opposé) et séma (=signe, sens).
Les Chinois disent que le YIN et le YANG sont énantiosémiques. Les chimistes parlent d’énantiomorphes pour les inverses optiques ou antipodes.
Et le philosophe estime que le meilleur mariage se réalise par énantiopsychisme quand les deux conjoints ont des caractères différents, non ambivalents, mais opposés.

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